À vous tous que j’aime de loin
4 mai 2017
À vous tous que j’aime de loin,
À travers mes journées tranquilles, je vous ai écrit et réécrit ceci, car je ne savais pas comment le dire ou plutôt, parce que je n’avais pas le courage de l’écrire… Je sais que je suis loin et je réalise le mal que cela peut vous faire. J’ai repensé à beaucoup de choses dans les dernières semaines – entre autres, à vous que j’aime tant, parce que vous emplissez toutes mes pensées. J’ai réalisé ce que je veux vraiment. J’aimerais être là. Ou plutôt j’aimerais que vous soyez là avec moi (parce que c’est plus beau l’Irlande que le Québec, surtout l’hiver! #exotisme). Et bien qu’une petite partie de moi aimerait dire qu’elle se sent confortable dans sa solitude et que ce voyage est la meilleure chose qu’il lui soit arrivé, la vérité, c’est que je souffre.
Je m’explique. Je ne regrette – et ne regretterai – jamais d’avoir pris la décision de partir. C’est un défi que, je crois, tous devraient relever à un moment ou à un autre (on s’entend qu’il y a pire que l’Irlande!). Mais c’est dur d’être loin de ses proches.
Je vous vois venir, les habitués du voyage solo et les fanatiques de backpacking : « Voyons, t’es loin de tout le monde. Profites-en pour une fois vu que t’es finalement seul et sans attaches! »
Oui, je suis seul. Oui, je fais ce que je veux quand je le veux. Mais suis-je réellement sans attaches? Non. Contrairement au voyageur typique, je ne me déracine pas aussi facilement de mon chez-moi. Je suis plutôt du genre à rechercher l’attention des gens que j’aime, malgré l’océan qui nous sépare (si tu me connais, tu ne devrais pas être surpris!). J’ai besoin de cette stabilité. De rester en contact avec des gens que j’apprécie et en qui j’ai confiance. Alors non, je ne suis pas sans attaches. Et ce n’est pas une mauvaise chose.
Je m’étais dit que le voyage changerait ma façon d’être. Que la distance avec tout le monde et l’excitation d’un voyage solo me seraient montés à la tête, quitte à me transformer en une toute autre personne. Ce n’est pas arrivé. Et j’en suis ravi. Je suis ce que je suis: un flanc mou en manque d’attention pour qui l’anxiété est une compagne de vie. En partant, je ne disais pas : « Sayonara bitches, je sacre mon camp! » mais plutôt : « Je suis désolé, mais je vais devoir être égoïste. » Grosse différence dans le message! Je ne l’avais pourtant pas réalisé avant mon départ. En fait, je crois qu’on ne le réalise pleinement que lorsque l’on se retrouve seul avec ses pensées et que plusieurs personnes nous manquent. Comme ça a été le cas pour moi.
Dans les mois qui précédèrent mon départ, j’ai rencontré des personnes fantastiques : des amis, des vrais. J’ai consolidé certaines amitiés de longue date. J’ai eu l’occasion de vivre des expériences insanes : être ambassadeur pour la microbrasserie Boréale, aller au Costa Rica sur un coup de tête, faire des mini roadtrips au Québec, et j’en passe. Au fil de ces aventures, j’ai grandi. Je suis tranquillement sorti de cette spirale sombre où je commençais à me complaire. J’étais à un bon endroit dans ma vie. Tout semblait aller pour le mieux. Et j’avais vous, en qui j’ai développé un confiance absolue. Mais je devais partie.
Ceci ne signifiait pas pour autant vous oublier. Je voulais simplement profiter de ce temps qui m’était donné. Pour cet homme brisé que j’étais, je me devais de faire ce voyage. Pour me prouver que j’étais capable de le faire et aussi pour rentabiliser mon année sabbatique (pensée capitaliste oblige). Mais soyons honnête. La vérité sale, c’est que c’était aussi pour passer le temps, car je commençais à m’emmerder. Ne pensez donc pas que je l’ai fait pour vous fuir.
Je ne voyage pas à l’autre bout du monde pour apprécier tel monument ou tel musée. Je ne voyage pas non plus seulement pour voir de magnifiques paysages ou pour dire que je suis allé à tel endroit. Mais à quoi bon voyager, si c’est pour le garder pour moi? J’aime partager, j’aime avoir l’attention des autres et en donner, j’aime voir au travers des yeux des autres et vice versa. Je vais le dire plus clairement : je vis dans le regard des autres. Pourtant, ce n’est pas un défaut. On diabolise bien souvent ce trait de caractère – moi le premier – mais vivre dans le regard des autres n’est pas nécessairement un défaut insurmontable. En être conscient te permet de rediriger ce désir d’attention d’une façon qui te rendras heureux. Je partage des liens et des vidéos sur Facebook, car j’aime partager des choses qui m’ont fait sourire, qui m’ont fait rire ou pour faire découvrir quelque chose à mes amis. Je publie mes photos, car je veux donner l’occasion à d’autres de visiter les endroits que je visite à travers leur écran, dans le confort de leur salon.
Je vis à travers le regard des autres et j’ai besoin d’attention. De votre attention. Ce n’est pas maladif, c’est simplement un moyen pour moi de rester proche de vous. Je ne suis pas un loup solitaire et je ne le serai jamais, car j’ai trop besoin de l’opinion et du soutien de ceux que j’apprécie. Je vous aime et vous me manquez.
Au plaisir de vous revoir,
Thomas
Couverture: Thomas G.