Un entre-deux

Ça restera entre nous

L’effervescence d’une année sabbatique (Partie 2)

(suite de la première partie)

Après avoir commencé mon année sabbatique, j’ai eu beaucoup de temps pour moi-même. C’est à partir de ce moment que je me suis dit que partir en voyage me redonnerait peut-être une raison d’être, un but. Quitter l’école m’avait anéanti et j’étais maintenant résolu à trouver ma propre voie, de quelque façon que ce soit. Je m’attendais à ce que ce voyage m’offre cette grande révélation que j’attendais depuis longtemps. Surtout, parce que je n’avais pas Internet pour m’occuper, je n’avais pas de protocoles scientifiques à étudier, je n’avais pas de drogues assez fortes pour me montrer le chemin doré des farfadets. Je n’avais rien. Je me retrouvais seul devant tout cela et je ne savais pas comment faire.

Bien que mes amis auraient pu m’aider, la dépression est une chimère qui te convainc à tort que tu es seul au monde avec ce problème et que rien ni personne ne peut t’aider à souffler un peu. Alors, avec toute ma volonté, je me suis forcé à trouver la cause de mon problème. J’ai réalisé qu’il s’agissait de la perte d’un point de fuite, d’une raison d’être. Cela m’aura pris 20 ans à comprendre que j’en avais besoin, mais au moins, j’y suis arrivé. Je me suis forcé à me prouver que j’avais quelque chose qui clochait et je l’ai trouvé au fil de mes recherches : dépression et anxiété de vulnérabilité. Ensuite, il me fallait trouver une façon de résoudre la situation, alors que j’étais convaincu qu’il n’y en avait pas. Je me suis alors forcé pour trouver un parcours logique mais imparfait, qui allait me permettre de trouver, avec la consolidation de mes valeurs et de mes convictions, quelles étaient mes vraies ambitions. Je pourrais ensuite formuler un but et me sortir de ce trou que je m’étais creusé. C’est ainsi que j’ai décidé de profiter du moment présent.

J’ai parfois l’impression de le vivre différemment des gens, mais je suis tout de même capable de live in the moment. Pour moi, se poser sur le bord de l’eau, c’est apprécier l’existence de la lune et son influence sur les montées et descentes de la marée, la présence des vents dans lesquels volent les oiseaux, la surprise que j’aurais de réchauffer le sable sur lequel je suis assis alors qu’il deviendrait vitre, vitre qui pourrait me permettre de voir à travers mes lunettes le fait que mon corps est présentement en train de digérer le maigre déjeuner de ce matin, le fait qu’à ce moment dans le monde quelqu’un est en train de faire un bébé et moi j’écris ceci, seul. Mais c’est ma façon de le vivre et c’est une façon de voir la vie qui me convient et me satisfait. Ce fut tout un travail de me faire réaliser que ce n’est pas parce que tu es différent que tu es moins que rien.

La dépression, c’est le novembre de l’âme, le décembre du désir.
Philippe Labro
Via : Unsplash.

J’ai été obligé de me concentrer 8 mois, 24h par jour, 7 jours sur 7, sur moi, mes pensées, mon histoire et mes sentiments pour me comprendre. C’est donc tout un défi, mais un défi que tous peuvent surmonter. Car, tel un travail d’histoire du secondaire, vous retrouvez les liens entre les évènements qui vous ont formés et vous définissent. Au final, ce n’est pas un succès scolaire, mais bien une révélation qui vous attend. Vous serez finalement vous-même.

Pour moi, une année sabbatique est remplie de moments éprouvants, d’anecdotes amusantes, de pensées noires, de nouveaux rêves, de soirées mémorables, d’histoires épouvantables, de sourires et de pleurs. C’est une décision difficile que de prendre une année sabbatique, mais c’est aussi une des meilleures. Je ne te cacherai pas que la sortie du système scolaire peut être complexe, mais cela t’ouvres les yeux. Tu réalises finalement que tu peux te définir toi-même, seul. Tu peux finalement prendre du temps pour affronter tes peurs, tes soucis, tes démons et aussi te changer pour être la personne que tu aspires devenir. Tu peux travailler tes faiblesses et consolider tes forces. Tu peux te poser des questions importantes. Comment est-ce que tu veux définir ta vie? Pour moi, l’école est comme un train sans destination finale, on n’a jamais le temps de réaliser pleinement ce qu’il nous arrive et on passe devant beaucoup de choses très rapidement, sans trop se poser de questions. Et un moment à l’extérieur de ce train de vie permet de relativiser les choses. Ensuite, on peut décider la tête froide si l’on prend le prochain ou si l’on continue notre vie à pied, à notre propre rythme. Une année sabbatique est une étape difficile, car elle nous fait réaliser pleinement la grandeur des possibilités qui s’offrent à nous, mais elle nous permet aussi de choisir clairement. Et c’est bien mieux de se rapprocher de ses rêves que de les oublier.

 

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